Née en Suisse en 1821, d'une famille israélite, Elisabeth rachel Felix entre très jeune au conservatoire. A seulement 17 ans, elle est engagée à la Comédie Française. Grande interprète de Racine, son talent exceptionnel suscite un véritable triomphe à chaque représentation. Mais la tragédienne souffre de tuberculose. C'est alors que le romancier Mario Uchard lui recommande un séjour dans le midi, au Cannet, chez son ami Jean-Jacques Sardou.
Celui-ci, cousin de Victorien, appartient à une famille de négociants. Très riche et considéré comme un original, il fait construire une maison, placée en bordure du boulevard Carnot. D'après la documentation cadastrale, sa construction daterait de 1856-1857. La villa Sardou, appelée aussi « lou castèu » est à cette époque difficile d'accès, bordée du ruisseau des Escarasses. On y parvient par un étroit chemin pavé, qui commence par un passage voûté au niveau de la placette.
L'architecture baroque de la maison en fait une curiosité décrite dans tous les guides touristiques de l'époque. Elle impressionne le promeneur, avec son pont volant et ses deux tourelles, où dans l'une se trouve un oratoire. Ainsi d'après A. Czernicki, un des témoins de l'époque, cette maison «avait alors un extraordinaire cachet de poésie un peu sombre et de mystère », noyée dans les orangers, avec une cour ornée de fontaines et de statues. L'intérieur de la villa est tout aussi étonnant et étrange. Dans le salon, une cheminée en marbre sculpté représente un gigantesque olivier, avec des miroirs dans les interstices des branches, et une ramure qui s'élève jusqu'au plafond, lui-même décoré de planètes et d'étoiles. Les vitraux de la maison auraient été dessinés par M. Sardou lui-même.
Aussi, ce « château » à peine achevé, devient rapidement célèbre avec la tragédienne Rachel. Elle quitte Paris le 14 septembre 1857 pour arriver au Cannet le jour de la fête de la Saint-Didier. Une aubade est donnée en son honneur. Durant son séjour, elle reçoit de nombreux visiteurs dont le Prince Napoléon. Mais sa maladie s'aggrave rapidement et elle décède dans les bras de sa sœur en janvier 1858. Ses funérailles ont lieu à Paris devant une foule immense. Le célèbre lit d'albâtre où elle mourut, surmonté au pied de la statuette de Polymnie, muse de la poésie lyrique, exprime bien le goût particulier pour ne pas dire excentrique du maître de maison. De nombreuses cartes postales, représentant le lit ainsi que le salon, seront éditées dès 1909.